Le ministre de la Santé publique du Cameroun, le Dr Manaouda Malachie, a tenu un point de presse sur de l’évolution de la Covid-19 dans le pays, sur la stratégie du gouvernement, mais surtout, sur la gestion des finances liées à la pandémie de la COVID-19. Ici la déclaration de presse du 24 juillet 2020 du ministre de la Santé publique, Dr Manaouda Malachie, à partir de la salle de Conférence du ministère de la Santé publique à Yaoundé.
« – Mesdames et Messieurs les professionnels des médias,
– Mesdames et messieurs,
Le Cameroun, comme vous le savez tous, a enregistré ses deux premiers cas positifs respectivement les 05 et 06 mars 2020, le premier cas étant le fait d’une importation et le second un contact de ce dernier. Depuis lors, le dispositif qui jusque-là assurait la surveillance épidémiologique a activé sa riposte afin de mieux juguler la propagation de cette pandémie.
Les efforts du Cameroun, sous la direction effective de Monsieur le Président de la République et la coordination du Premier Ministre, Chef du Gouvernement, se sont articulés autour d’une stratégie fondée dans un premier temps sur le suivi rapproché des contacts des cas positifs, et une activation de la surveillance fondée sur le fonctionnement du centre
d’appel.
Cette stratégie a globalement permis de contrôler la pandémie pendant un temps relativement réduit, étant entendu que la pression liée aux mouvements migratoires vers le Cameroun, a considérablement augmenté la propagation du virus.
Face à ce défis et en application des très hautes instructions du Président de la République, le Gouvernement a pris un ensemble de mesures, treize au total, rendues publiques par le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, dans sa communication spéciale du 17 mars 2020.
Parmi celles-ci figurent en bonne place la fermeture de l’espace aérien, maritime et les frontières terrestres, ainsi que la limitation des grands rassemblements humains, tout autant que des restrictions en rapport avec les lieux de loisir ou les transports en commun.
Ces mesures diversement appliquées, couplées par certaines indisciplines, ont provoqué une flambée de l’épidémie, dans les régions du Centre et du Littoral, toute chose qui a amené le Gouvernement à revoir sa stratégie dès le mois d’avril et envisager l’option du dépistage massif des populations pour une recherche active et communautaire des cas
positifs, et leur prise en charge immédiat.
C’est alors que le Chef de l’Etat a décidé de la mise en place des Centres Spécialisés de Prise en Charge des Patients COVID-19 dans toutes les Régions.
Pour preuve, la barre symbolique des cinquante mille (50 000) tests réalisés a été franchie le 15 juin 2020 ; ce qui nous a permis de sortir le maximum de personnes de la communauté, limitant ainsi la propagation de l’épidémie. Ceci me permet de vous donner quelques détails sur la situation épidémiologique au 24 juillet 2020, avec comme faits saillants : Un cumul de cas positif chiffré à 16708 pour 14 539 personnes guéries et malheureusement 385 décès pour un total de 30 patients sous
oxygène.
Le total de tests réalisés à date est de cent quarante-cinq mille (145 000). En y rapportant le nombre de cas positifs, on se rend compte que le Cameroun enregistre un taux de sévérité de 1,7%. En ce qui concerne le taux de guérison, le Cameroun affiche 87,5% contre un taux de létalité de 2,3%.
Mesdames, Messieurs, ces chiffres et valeurs, montrent que le Cameroun jusqu’ici, assure une bonne maîtrise de la pandémie, dont les principaux indicateurs résident dans la capacité à réduire la mortalité des patients, mais aussi la pression sur les formations sanitaires. A ce propos, on relève que le taux d’occupation des lits dans les structures destinées à
assurer la prise en charge des patients est de 11,9%, soit 409 lits occupés sur les 3.500 prédisposés pour le suivi des personnes affectées par le COVID-19.
Ces résultats, devraient donc continuer de mobiliser nos efforts, toutes parties confondues, afin d’évoluer vers la maîtrise absolue de la pandémie dans notre pays.
En ce qui concerne les populations et les leaders d’opinion, il serait utile de noter que le respect des mesures de santé publique sont plus que d’actualité. Il reste impératif de toujours porter son masque, de se laver les mains, de garder les distances physiques nécessaires pour éviter toute contamination.
C’est le lieu de rappeler ici que la maîtrise de la pandémie ne devrait pas être comprise comme un retour à certaines pratiques, notamment les regroupements à forte concentration et densité humaine. Pour ce qui est du gouvernement, l’option prise est d’articuler la riposte autour de trois objectifs stratégique :
Le premier étant d’endiguer, mieux de stopper la transmission communautaire du virus là où elle est déjà active et l’éviter dans les districts qui ne présentent que des clusters épidémiologiques. Le 2ème est la réduction de la morbi-mortalité due au COVID-19 et notamment chez les personnels de santé. C’est d’ailleurs l’occasion pour moi de saluer ici l’engagement et la détermination de nos différentes unités de prise en charge des patients positifs au COVID-19, qui ont réussi
à sortir de cette situation sans contamination directe de nos personnels en situation de travail.
Enfin, notre stratégie s’articule autour de l’objectif de réduction, ou de mitigation de l’impact de la pandémie au nouveau coronavirus sur le système sanitaire, qui devrait poursuivre sereinement la délivrance des soins et services de santé aux populations et notamment ceux primaires, pour garantir au premier chef, la santé de la mère et l’enfant qui apparaissent comme les plus vulnérables.
Mesdames, Messieurs les Professionnels des médias,
Qu’il me soit permis à la suite de cette situation sur la gestion sanitaire de la pandémie du COVID-19, de revenir un temps soit peu sur le rôle de nos soldats dans cette bataille, qui n’est certainement pas gagnée, mais suffisamment maîtrisée.
Aussi, à la suite du Président de la République qui a non seulement adressé ses félicitations aux personnels de santé en ligne de front de cette riposte, mais leur a aussi fait une des plus grandes fleurs, celle de la prorogation de leur âge de départ à a retraite, à la suite du Chef de l’Etat, et en droite ligne de ces vives félicitations, je voudrais ici dire toute l’appréciation du Gouvernement pour leur abnégation, leur dévouement et leur sens du sacrifice, pour épargner notre pays de la catastrophe
sanitaire qui aurait pu s’y abattre. Je le rappelais déjà à souhait dans la lettre ouverte que je leur ai adressé le 23 juin dernier.
On ne le mentionne certainement pas assez, mais nos personnels se sont mobilisés dans cette riposte depuis le mois de février, au péril de leur vie, de leur santé ou même de leur univers social. J’ai moi-même été témoin de cet engouement, de cette volonté de retourner au front, manifestée par bon nombre de nos personnels affectés par le COVID-19.
C’est l’occasion ici de réparer certaines injustices qui sont faites à nos soldats quand une certaine opinion tend à les prendre pour des personnes sans humanisme.
Bien au contraire, l’implication des personnels de santé dans cette lutte est le signe même de l’humanisation des soins inscrite comme crédo de la vision du Chef de l’État son Excellence Paul Biya en ce qui concerne le secteur de la santé.
Vous comprendrez donc que le Président de la République ne pouvait rester insensible à cette marque d’engagement et de dénouement dans un contexte de crise sanitaire sans précédent.
Mesdames, Messieurs,
Sur un tout autre plan, permettez-moi également de déférer à une exigence forte du Président de la République, en rapport avec la gestion de la pandémie du COVID-19, notamment l’impérieuse nécessité de transparence et de redevabilité, qui est d’ailleurs l’un des piliers de notre action.
Je voudrais à cet effet apporter quelques précisions sur la gestion financière et logistique, adossée sur un système propre aux règles de finances publiques, dont l’une des plus pertinentes est le principe de séparation entre l’ordonnateur et le comptable.
Ce principe permet notamment de relever que les fonctions d’ordonnateur assurées jusqu’ici par le Ministère de la Santé Publique, à travers le Secrétaire d’État en charge de la lutte contre les épidémies et les pandémies sont clairement distinctes de celles du comptable publique qui assure le paiement des dépenses effectuées par l’Ordonnateur. Le comptable en question ici est donc le Trésor public qui assure régulièrement le paiement des dépenses exécutées suivant le principe de
la commande publique.
Parlant notamment de la commande publique, je voudrais indiquer ici que le Ministère de la Santé Publique a obtenu, suivant les dispositions pertinentes du code des marchés publics, l’autorisation de passer par la procédure des marchés spéciaux, ce qui lui donne le droit de saisir un prestataire et lui offrir toute commande possible.
Aussi, dans une optique de transparence et d’équité, un avis à manifestation d’intérêt a été lancé le 14 mai 2020, afin de préqualifier toutes les entreprises aptes à assurer des prestations dans le cadre de la riposte au COVID-19, suivant un principe de spécialisation.
Il faudrait noter que l’un des critères les plus pertinents ici est la capacité financière des entreprises qui se positionnent pour traiter avec l’Etat dans ce cadre. De même, afin de limiter les risques de collusion, mais aussi de garantir à la fois le respect des prix référencés dans la mercuriale et des économies à l’Etat dans le processus de contractualisation, une commission spéciale chargée de préparer et de donner un avis sur les projet de marchés et lettres commandes spéciaux, a été mise sur pied.
Cette commission composée d’experts du Ministère de la Santé Publique, du Ministère des Finances, de l’Agence de Régulation des Marchés Publics, entre autres, se penche régulièrement sur le respect des règles en matière de commande publique, mais surtout sur la régulation des prix.
Bon nombre de prestataires ont d’ailleurs vu leurs offres de coûts, revues à la baisse, sous réserve de les voir simplement rejetées, en raison de ce que les prix proposés, mêmes en étant en conformité avec la mercuriales, pouvaient clairement être révisés, tout en garantissant aux prestataires, des marges raisonnables.
Tenez par exemple, les prix validés par les instances en charge de la régulation commerciale, proposent des combinaisons intégrales à des prix allant de 47 000 à 80 000 Francs CFA, pendant que le redressement des prix pratiqués par cette commission, permettent d’acquérir ces produits entre 33 000 et 35 000 Francs CFA.
A ce jour d’ailleurs, toutes les commandes sont facturées à 33 000 Francs CFA. Il en est de même pour les surblouses dont la validation est fixée à 30 900 Francs CFA, alors que les prix pratiqués sont fixés à 10 925, ou encore des masques à usage unique référencés à 3 008 Francs CFA, mais acquis entre 750 et 1150 pour les masques chirurgicaux, et à 1 750 pour les masques FFP2.
Dans le même souci de conformité des prix des commandes effectuées, il faudrait noter que bon nombre d’articles et prestations nécessaires dans la riposte au COVID-19, mais non référencés dans la mercuriale officielle des prix en 2020, ont toujours fait l’objet d’une validation par le Ministère du Commerce, sur la base des factures fournisseurs produites par les prestataires, ainsi que les autres frais directs qui rentrent dans le coût de revient de ces derniers.
Toutes ces démarches sont d’ailleurs rendues nécessaires par le constat de baisse de tension sur le marché national et international observée depuis la fin du mois de mai.
A toutes fins utiles, le Cameroun, à l’instar d’autres pays africains, ayant connu la survenue de la pandémie après le pays d’Asie, d’Europe et d’Amérique, s’est heurté à la rareté des équipements de protection individuelle, des équipements de surveillance, ou encore des équipements médicaux de prise en charge des patients.
Il était donc normal qu’avec la baisse des prix à l’international et la reprise de la production des équipements par les pays asiatiques, nous invitions les différents prestataires à revoir leurs prix.
Du point de vue des dépenses totales effectuées, la riposte sanitaire coûté au cours des cinq derniers mois un montant total de 20.204.325.314 FCFA, répartis ainsi qu’il suit :
– Construction des unités d’isolement dans les villes de Bertoua, Ngaoundéré, Garoua, Ebolowa, Mandjou et Douala (Hôpital Laquintinie), et du poste de santé aux frontière de Yaoundé Nsimalen : 1.998.355.778 Francs CFA ;
– Réhabilitation, rénovation et extension de certains pavillons à l’Hôpital Central, l’Hôpital Jamot et l’Hôpital Général de Yaoundé, pour les rendre aux normes d’isolement : 1.745.146.621 francs CFA
– Aménagement du Centre de Prise en Charge de ORCA, y compris la centrale et le réseau de distribution de l’oxygène :
785 235 000 Francs CFA. Il faudrait noter que les équipements de tous les services de cet hôpital n’ont pas encore été payé et même facturés, en raison de la nécessité de procéder à la validation effective des prix par le Ministère du Commerce, l’essentiel des articles n’étant pas référencés dans la mercuriale.
– Aménagement des Centres Spécialisés des Stades militaire et Mbappe Leppe, y compris l’équipement en matériel médical et mobilier hospitalier : 836 512 638 Francs CFA
– Aménagement des sites d’isolement des logement sociaux d’Olembe et Mbanga Mbakoko, y compris l’équipement en
mobilier hospitalier et en matériel médical, ainsi que la réfection et l’équipement d’une formation sanitaire : 1 988 547 241 Francs CFA ;
– Acquisition des équipements médicaux de prise en charge distribués dans les différents sites de prise en charge (lits d’hospitalisation et de réanimation avec matelas et draps, appareils d’assistance respiratoire, moniteurs de surveillance,
saturomètres, glucomètres, etc…) : 3 932 784 557 francs CFA ;
– Acquisition des équipements de protection individuelle : 5 700 041 422 Francs CFA ;
– Gestion de l’hygiène et du wash comprenant la désinfection régulière des lieux publics, l’acquisition de matériel de wash, notamment des pulvérisateurs à dos, du chlore, des thermonébulisateur, des bottes en plastique, gants de ménages : 900 462 397 ;
– Confection des supports de sensibilisation, des spots, déploiement dans les 10 Régions et campagne de
communication sur 5 mois : 358 967 000 Francs CFA ;
– Acquisition des tests dépistages : 1 711 500 000 Francs CFA ;
– Ressources mises à la disposition des fonds Régionaux de la Promotion de la Santé, pour achat des médicaments
300 000 000 F CFA
– Ressources mises à la disposition des formations sanitaires : 773 629 700 Francs CFA ;
– Ressources mises à la disposition des régions : 916 396 200 Francs CFA, soit 267 000 000 Francs CFA pour les Autorités
Administratives et 649 000 000 pour les Délégués Régionaux ;
– Gestion des personnes confinées dans les hôtels : 614 763 961 Francs CFA
– Gestion des personnes dans le site d’Olembé : 211 992 658 Francs CFA.
Ces ressources ont notamment permis d’acquérir :
– 300 lits de réanimation,
– 2 500 lits d’hospitalisation avec matelas ;
– 150 équipements d’assistance respiratoire dont quarante respirateurs ;
– 6 830 000 équipements de protection individuelle, soit cent trente mille combinaisons thermoscellables, cent mille surblouses, sept cent mille surchaussures, un million huit cent mille gants de soins et huit cent mille gants chirurgicaux, trois millions de masques chirurgicaux et trois cent mille masques FFP2.
De même, ces ressources ont permis d’accroitre la capacité d’accueil de moins de vingt lits au départ à 3 540 lits d’hospitalisation, et de rénover les réseaux de distribution des fluides médicaux dans nos formations
sanitaires.
Mesdames, Messieurs,
Je voudrais donc sur ces notes de détails, qui pourraient être plus exhaustifs, si les contraintes de temps ne nous liaient pas, nous inviter à rester concentrés sur les objectifs de cette lutte et garder le cap de la réduction significative de la propagation du COVID-19 et de ses impacts au Cameroun.
En tout état de cause, le souci de transparence et de respect de procédure continueront de présider aux besoins de la gestion des ressources mises à la disposition aussi bien par l’État que par les particuliers, dans le cadre de la lutte contre cette pandémie.
Cela dit, je souhaite toutefois que la communauté nationale continue de se concentrer sur l’essentiel, à savoir renforcer notre soutien aux équipes de riposte et éviter toute polémique qui nous éloigne du principal, c’est à dire, juguler la pandémie du COVID-19.
Nous devons donc rester vigilants sur l’observance des mesures de santé publique et se rappeler à tout moment que la pandémie n’est pas vaincue, que la stabilisation apparente de la courbe de progression ne sera durable et solide que si chacun prend les précautions utiles pour arrêter la circulation active du virus.
Cette vigilance que nous avons sur la nécessité de transparence devra être encore plus accrue en ce qui concerne le respect des prescriptions relatives à la lutte contre le coronavirus.
Je vous remercie de votre aimable attention,
Que Dieu bénisse le Cameroun. /-«
Par le Dr Manaouda Malachie
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