Dans les zones rurales, la plupart des populations sont dans le déni du coronavirus et négligent donc les mesures-barrières.
« Pardon, embrasse-moi tranquillement : il n’y a pas le coronavirus ici au village. C’est votre maladie là-bas à Yaoundé ». Nous sommes dans un village de la Lékié. Une grand-mère, heureuse des retrouvailles avec sa petite-fille qu’elle n’a pas vue depuis des mois, se jette allègrement dans ses bras. Malgré les réticences et les explications de la citadine qui insiste pour protéger la matriarche de la maladie de l’heure, rien n’y fait. « Depuis que vous avez commencé avec votre affaire là, as-tu appris qu’on a suspecté le moindre cas ici dans nos contrées ? », défend la vieille femme, battant en brèche toutes les inquiétudes soulevées relativement à son âge avancé et son état de santé précaire. Le voisinage, accouru à l’arrivée de la visiteuse, est entièrement d’accord pour dire que le Covid-19 ne fréquente nullement le village. Son masque enveloppant bien le nez et la bouche, la petite-fille essaie de garder ses distances, sans beaucoup de succès.
Au-lieu du deuil qui l’amène, non loin de la concession familiale, une foule immense est rassemblée. On se marche quasiment sur les pieds. Les uns et les autres s’embrassent sans aucune précaution. Maïs grillé, prunes et manioc cuits sur les braises changent de mains, sans souci de l’hygiène non plus. Personne ne porte de masque et ne se lave les mains. De plus, l’on est assis coude à coude, faisant fi de la distanciation sociale. La porteuse de masque suscite constamment la curiosité et des blagues déplacées. « Ne t’inquiète pas, tu es en sécurité ici. Ici, l’air est bio. Nous prions pour vous de la ville là, vous devriez plutôt effectuer un retour au village de nos jours », invite un notable à la chefferie. Tout effort pour convaincre ces populations des risques qu’elles courent est clairement vain.
Quelques heures plus tard, de passage au chef-lieu du département sis à environ sept kilomètres, l’on observe les mêmes négligences. L’on peut compter sur les doigts d’une main ceux qui arborent un masque de protection. Dans la principale agence de voyages du coin, aucune disposition n’est prise pour rappeler les contrevenants à l’ordre. D’ailleurs, il n’y a pas de point de lavage des mains et le port du masque n’est pas exigé aux usagers. La température n’est pas prise non plus. Pourtant, les affiches à l’intérieur des cars et sur les murs de la compagnie sont parlantes. Mais sur la trentaine de passagers d’un car, un seul porte un masque. Le voyage s’effectue jusqu’à Yaoundé, sans que la situation n’interpelle les autres voyageurs, encore moins les pandores aux postes de contrôle sur l’axe.
Cet article a été écrit et publié en premier par Cameroon Tribune
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